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L’ART SUBTILE DE LA CULPABILITÉ COLLECTIVE

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Parmi les stratagèmes politiques qui résistent au temps, il en est un dont la redoutable efficacité demeure intacte.

Il s’agit de cette manipulation politique consistant à transformer une situation complexe en responsabilité partagée, en commençant par soi-même pour mieux entraîner les autres dans un sentiment collectif de culpabilité. L’acteur politique, feignant l’humilité, s’accuse d’abord à voix haute de manquements ou d’erreurs. Mais à travers cette apparente sincérité, il tisse habilement une toile où chacun est progressivement sommé de reconnaître sa propre part de faute.

Cette mécanique n’est pas nouvelle. Dans l’histoire, elle a souvent servi de levier aux dirigeants cherchant à renforcer leur emprise. Les tribuns de la Rome antique, par exemple, n’hésitaient pas à s’inclure dans la dénonciation des excès du peuple pour mieux exiger ensuite une discipline commune. Plus près de nous, certains régimes africains post-indépendance ont usé de la même méthode. Après avoir reconnu leurs propres « erreurs de jeunesse politique », les dirigeants invitaient la nation entière à porter le fardeau de l’échec collectif, diluant ainsi les responsabilités individuelles.

Dans le monde contemporain, ce procédé se retrouve encore. Qu’il s’agisse de crises économiques ou de bouleversements sociaux, combien de fois a-t-on vu des gouvernants commencer par admettre « leurs limites » pour aussitôt étendre la faute à tout un peuple accusé de paresse, d’indiscipline ou d’aveuglement collectif ? De ce déplacement subtil, naît une adhésion forcée. Nul ne souhaite apparaître en marge du destin commun, et chacun finit par endosser, parfois malgré lui, la culpabilité qui légitime ensuite des sacrifices supplémentaires.

Sous le masque de la sincérité et de la solidarité nationale, cette manipulation transforme la contrainte en consentement, l’accusation en union forcée et le mensonge en horizon partagé.

Ainsi, l’histoire nous enseigne que la culpabilité collective n’est pas toujours un appel sincère à la responsabilité commune, mais bien souvent une mise en scène destinée à asservir les esprits sous couvert d’unité.

 

A. MACO

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