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LE DJIHADISME AU CABO DELGADO

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Depuis maintenant un peu près de dix ans, les attaques ne cessent de se renouveler dans cette province du Mozambique, riche en ressources naturelles, au point d’être devenu un carrefour de rencontres pour toutes les multinationales, tandis que les populations autochtones demeurent marquées par une extrême pauvreté.

En quelques jours, à la fin du mois de Mai dernier, deux attaques quasi consécutives se sont soldées par une vingtaine de morts parmi les soldats de l’Armée régulière du Mozambique. Ces attaques djihadistes sont devenues presque une routine, depuis près de dix ans. Cette fois-ci, c’est le Groupe affilié à l’état islamique, Al-Chabab ou peut-être Ansar-Al -Sunna, qui a envahi et occupé la petite ville de Mocimbo Da Praia durant plusieurs jours, dans un climat de terreur, malgré la présence de bases militaires, mozambicaine, rwandaise et tanzanienne.  Rien ne semble effrayer les djihadistes qui répandent la désolation et la mort parmi les populations.

 

Le canal de Mozambique est une zone stratégique, devenue désormais particulièrement dangereuse. Les pirates y ont perpétré, pendant longtemps, des attaques meurtrières au large des côtes de cette région d’Afrique australe, mais les richesses, essentiellement pétrolières et gazières de cette province du Cabo Delgado attirent les convoitises, pas seulement des majors internationaux du pétrole. L’état Islamique, ainsi que d’autres groupes djihadistes, y ont trouvé une raison de s’y déployer.

 

La région est riche en gaz, ses réserves atteignent plus de 5000 milliards de mètres cubes et il s’ensuit, naturellement, que les grandes multinationales du domaine font les yeux doux aux dirigeants du Frelimo qui contrôlent le pays depuis l’indépendance. Les forces armées du Mozambique, pourtant composées de combattants expérimentées et aguerries dans l’art de la guerre, ne parviennent pas à anéantir cette menace existentielle de sa souveraineté nationale.

 

La présence des Groupes pétroliers s’épelle dans un chapelet d’entreprises plus puissantes les unes que les autres. On y  trouve, pêle-mêle, TOTALENERGIES, EXON, MOBIL, ENI, ainsi que la CHINA PETROLEUM CORPORATION. En d’autres termes, la fine-fleur de l’industrie pétrolière mondiale.

Toutes ces Multinationales ont investi des sommes souvent considérables, les investissements se chiffrent en dizaines de milliards de dollars dans des concessions du bassin de Rovuma, dans des actions partagées avec l’Etat mozambicain.

 

Dans le même temps, les groupes miniers ont également afflué au CABO DELGADO, les australiens exploitent le graphite à Balama, tandis que les britanniques, non loin de là, remplissent des sacs de rubis, pierre précieuse très prisée, autour de la ville de Montepuez. L’ouverture sur la mer de ces centres miniers se fait à partir de Pemba. La zone étant a priori sécurisée par des bases militaires mozambicaines. Dans les faits, celles-ci sont souvent défaillantes.

 

La sécurité étant naturellement un enjeu majeur, le gouvernement a fait appel au groupe russe, décrié, WAGNER. C’était en 2019, et 200 mercenaires russes, grassement payés, ont débarqué à Maputo. La Russie fut longtemps, à l’époque de l’apartheid un soutien du pays, il s’agissait donc du renouveau d’une ancienne relation. L’échec fut cuisant et WAGNER s’est retiré en 2020. L’Afrique du sud vient à la rescousse, mais rien n’y fait, les attaques djihadistes se poursuivent, plus meurtrières, et à leur tour les sud-africains plient bagages.

 

Le conflit armé prend alors une tournure régionale avec l’implication de la SADC. L’organisation régionale dépêche une force commune de 8 pays, Angola, Botswana, RDC, Lesotho, Malawi, Afrique du sud, Zambie et Tanzanie. La force commune se heurte à des problèmes logistiques, il est difficile d’acheminer du matériel militaire dans la région et le rapport de force entre les deux camps ne change pas !

Le coût des opérations militaires contraint la SADC à jeter l’éponge et en 2024, seuls demeurent le Rwanda et la Tanzanie pour poursuivre la coopération avec Maputo.

 

L’armée rwandaise est une puissance disciplinée et redoutable, c’est elle qui va déloger finalement les terroristes de Mocimboa da Praia en 2021, permettant ainsi la reprise de l’exploitation gazière.

 

D’ailleurs les relations entre le Rwanda et le Mozambique s’expriment dans un climat de confiance partagée. Une ambassade de Kigali est ouverte à Maputo en 2021.

 

L’union européenne envoie dans le même temps des fonds importants, non pour assurer les fins de mois de Maputo, mais pour lui permettre d’acquérir du matériel militaire, ce qui démontre, on ne peut mieux, du caractère stratégique apporté au développement des richesses du Mozambique.

 

Le Rwanda de son côté intervient directement dans l’exploitation des richesses minières du CABO DELGADO, à travers la société CRYSTAL VENTURES qui est le bras économique du Front Patriotique Rwandais, il protège également les intérêts de TOTALENERGIES et de ses investissements majeurs.

 

Mais, il s’avère désormais que le Rwanda ne peut pas à lui seul régler le problème djihadiste. L’insécurité a conduit plus d’un million d’habitants à fuir la région, les enlèvements, mariages forcés, pillages, viols ne cessent de se multiplier. Les djihadistes se déguisent et font des carnages en se fondant dans la population des villages.

 

La suite naturelle qui s’installe est alors une méfiance généralisée envers ceux qu’on ne connait pas.

 

Soucieux d’intensifier la lutte, Maputo a fait des acquisitions de matériels sophistiqués, notamment de moyens aériens développés par l’Afrique du sud. Une importante acquisition de drones chinois est en négociation.

 

Les djihadistes demeurent actifs, en raison des richesses côtières considérables. Ces Djihadistes mozambicains sont originaires du Kenya où ils seraient les héritiers d’un chef religieux fondamentaliste du nom d’Aboud Rogo MOHAMED, tué à Nairobi.

Le CABO DELGADO est immensément riche, mais plus de 50% de sa population vit dans l’extrême pauvreté. La corruption y est colossale, l’afflux de capitaux, d’investissements et de prêts officiels se traduisent par l’accroissement des inégalités, ferment insupportable qui conduit aux révoltes. Le pays s’enlise dans la misère, il a emprunté des sommes colossales sur les recettes gazières, le remboursement de l’emprunt tarde en raison de l’insécurité qui retarde la mise en exploitation de certains projets, dont celui de TOTALENERGIES. Les recettes minières déjà laminées par la corruption sont insuffisantes pour couvrir des appétits croissants.

Le Djihadisme qui n’est souvent qu’un habillage de circonstance pour donner aux actes les plus pervers une dignité fournie par la couverture religieuse trouve dans ces turpitudes la force adéquate pour développer ses racines.
La Jeunesse africaine risque, une fois de plus, d’être la victime expiatoire de comportements rétrogrades et dévoyés.

 

 

Abdoul BARRY

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