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Navire fantôme, milliards engloutis: le scandale silencieux de la Société Navale Guinéenne

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Derrière l’image lustrée d’une entreprise récemment primée, la Société Navale Guinéenne (SNG) cache une gestion chaotique, entre acquisitions douteuses, surfacturations, connivences suspectes et dilapidation des fonds publics.

Enquête sur une dérive silencieuse qui menace de faire chavirer une institution nationale.

Tandis que la Société Navale Guinéenne (SNG) vient d’être désignée « Meilleure entreprise publique de l’année » par Émergence Magazine, de lourdes zones d’ombre pèsent sur sa gestion actuelle. Depuis la nomination de Mme Doussou Nabé à sa tête en janvier 2022, plusieurs faits graves de mauvaise gestion, de corruption et de malversation financière entachent l’image de cette entreprise publique.

Une base logistique transformée en gouffre financier

La SNG disposait déjà d’une base logistique de cinq (5) hectares dans l’enceinte du port sec de Kagbélén. Peu après leur prise de fonction, la nouvelle direction entreprend la réfection de la voirie et des réseaux divers (VRD). Pourtant, des travaux d’aménagement avaient déjà été réalisés pour accueillir des conteneurs. Sans justification solide, tout est démantelé pour refaire exactement les mêmes aménagements, utilisant les mêmes matériaux, pour un coût faramineux de plus de 9,5 milliards de francs guinéens.

Quelques mois plus tard, un autre chantier est lancé pour goudronner la même surface, entraînant de nouvelles dépenses inutiles. À ce jour, tous ces investissements restent non fonctionnels, révélant une stratégie de recyclage des travaux pour détourner des fonds publics, sans le moindre contrôle du Conseil d’Administration.

Un entrepôt de 18 milliards de francs guinéens laissé à l’abandon

Parallèlement à la situation du port sec de Kagbélén, la construction d’un entrepôt estimé à 18 milliards de francs guinéens (environ 2 millions de dollars) est engagée. Trois ans après le lancement des travaux, le chantier reste inachevé, sans perspective de livraison, ni communication officielle claire sur son état.

Le navire NIMBA ou l’acquisition d’une épave

Dans le cadre de l’exécution de son budget de 2023, la direction de la Société Nationale acquiert un navire baptisé NIMBA pour assurer la liaison entre Conakry et Kamsar. Ce ferry d’une capacité de 320 passagers pour 40 mètres de long, est  acheté à 2,1 millions de dollars à la société Tangerine basée à Jinan dans la province de Shandong en Chine. Ce vieux bateau a été convoyé par un équipage Chinois qui a séjourné pendant des jours dans un hôtel non loin de l’hôpital Ignace-Deen au frais de la SNG.

Bien avant, une délégation officielle composée des cadres du ministère des transports, de la Société Navale et de l’Agence de la Navigation Maritime, avait séjourné en Chine au mois de mai 2023 dans le cadre de cette acquisition.

Au port de Conakry, la réalité est alarmante a été constatée. Ce bateau NIMBA, construit en 1998, est une épave de 27 ans d’âge. Son état catastrophique est tel qu’il est incapable de quitter le port. Une expertise réalisée par Tangermed, société marocaine spécialisée, confirme l’ampleur du désastre : moteur hors d’usage, pièces de rechange introuvables, consommation exorbitante de carburant. Pire encore, aucune action n’a été engagée pour résilier le contrat ou réclamer un dédommagement. Ce silence de la direction indigne de nombreux travailleurs de la SNG.

Malgré ces constats accablants, le NIMBA est assuré pour près de 600 millions de francs guinéens auprès de Baraka Courtage, un cabinet appartenant, selon nos sources, à l’une des sœurs de la Directrice Générale de la Société Nationale. Un cas flagrant de gaspillage des ressources publiques et un possible conflit d’intérêts.

Finalement, la SNG a dû se tourner vers les chaloupes-traversières EXPRESS 1 et 2 offerts par la société UMS pour faire la liaison entre Conakry-Kamsar et les îles de Loos.

Des liens troubles avec TANGERINE et SEA COACH

Les relations entre la direction de la SNG et Tangerine suscitent de vives interrogations. Tangerine, entreprise de droit sierra-léonais détenue par un ressortissant nigérian, est également propriétaire de SEA Coach, exploitant de navettes entre la Guinée et la Sierra Leone. Selon des sources internes, SEA Coach utiliserait les installations du port de Sandervalia (appartenant à la SNG) sans s’acquitter des droits d’utilisation.

Par ailleurs, tous les navires acquis sous l’actuelle direction de Doussou Nabé, auraient transité par ce même circuit opaque SNG/Tangerine, alimentant les soupçons de favoritisme et de détournement de deniers publics.

Depuis plusieurs mois, nous avons tenté à plusieurs reprises de joindre la Directrice Générale, Mme Doussou Nabé, afin de recueillir sa version des faits et d’obtenir les pièces justificatives nécessaires.

Dans un premier temps, Mme Nabé, nous avait rassurés de sa disponibilité à répondre à nos questions tout en nous mettant à disposition des documents permettant d’éclairer sa gestion pour écarter toute accusation de malversation.

Malheureusement, cela fait plus de 3 mois, aucun document ne nous a été transmis. La Directrice Générale n’a jamais daigné se prêtée aux questions précises portant sur les différents sujets développés dans cette enquête, laissant planer un lourd doute sur la transparence de la gestion de la Société Nationale Guinéenne.

Au fil des mois, de plus en plus d’éléments laissent penser que la Société Navale sert désormais de portefeuille privé à ses dirigeants. Tandis que les projets s’enlisent ou échouent, des fonds de la SNG sont mobilisés pour financer des campagnes de propagandes au nom du CNRD, avec la bénédiction de figures influentes de la présidence, transformant la société en une véritable caisse noire.

A suivre.

Mamoudou Babila KEITA..

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